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Photo du rédacteurNathalie Giraud Desforges

Le photographe Ressan et son Paris Libertin

Dernière mise à jour : 6 mars 2021

Les dessous chics du libertinage, une interview de Ressan le photographe


Les soirées libertines parisiennes chics et très privées ont un écrin de plus. Visible au public, celui-ci est sublimé sur papier glacé. Pour la première fois, un ouvrage sur le libertinage voit le jour sous l’oeil bienveillant,  joueur et voyeur de Ressan, le seul photographe qui a su s’introduire dans les milieux fermés de ces soirées élégamment déshabillées et décadentes. Avec son livre Paris Libertin, il signe là une magnifique plongée au coeur d’une intimité très peu dévoilée.



Paris Libertin : les libertins se dévoilent sous l’oeil de Ressan


Une interview de Ressan sur les libertins parisiens où il est question de voyeurisme, de jeu érotique, d’Helmut Newton, de confiance et de complicité avec les libertins qu’il photographie.


1. NG : Photographe : vocation ou voyeurisme ?

RESSAN : Ni l’un ni l’autre, je me vois comme un témoin de son temps, je suis le regard d’un monde d’ordinaire discret.

Ma relative notoriété fait de moi un témoin privilégié de ces moments rarement montrés au grand public. C’est la première fois qu’un ouvrage photo est consacré à ce sujet. Sur certaines de mes images je me suis placé sous l’angle du voyeur, l’angle de celui qui regarderait par le trou de la serrure, c’est à la fois une technique pour cacher les visages, mais aussi placer le lecteur dans cette situation de l’invité, une forme d’intrusion dans l’intime.

Ce qui excite les couples dans ce type d’aventures, c’est une forme de transgression, qui n’est pas à la recherche de la transgression ? Notre existence est constamment confrontée à cette recherche.


2. NG : Photographier le libertinage n’est pas commun et j’imagine qu’il n’a pas été facile d’obtenir la confiance de vos sujets. C’est une mise en scène pour rompre avec les tabous de notre société? Une esthétique au service de “nouveaux plaisirs”?

RESSAN : Pouvoir saisir ces moments particuliers demande d’avoir la confiance absolue des personnes présentes, mais au delà de la confiance il faut aussi se faire accepter car je suis un élément extérieur au jeu. Je dois garder cette distance suffisante pour être là sans être là, être dans le jeu sans perturber ces moments intenses qui parfois se déroulent devant moi.



C’est une forme d’exploration dans les basses lumières, une balade dans le souffle des gens qui parfois envahit mon ouï. Je dois sans cesse évaluer la pertinence de ma présence, sentir qu’à tel ou tel moment d’une soirée je dois savoir m’éclipser ou au contraire que ma présence photographique participe à une certaine montée d’adrénaline.


3. NG : Dans votre interview avec Adam, du blog “Nouveaux plaisirs”, vous évoquez votre arrivée à Paris et peu de temps après votre rencontre avec Helmut Newton, racontez-nous cela.

RESSAN : Jeune, j’ai eu la chance je rentrer dans l’un des plus grands laboratoire Noir et blanc de l’époque. Ce labo traitait les tirages des plus grands photographes dont d’Helmut Newton, j’avais l’occasion de le voir travailler car j’allais régulièrement chez lui, il éveillait chez moi une certaine curiosité. De la même manière lorsque j’allais chez Magnum j’y croisais les plus grands correspondants de guerre qui rentraient soit du Liban ou d’Amérique du sud, des régions qui ne manquaient pas d’actualités brûlantes.

Avoir 17 ans et avoir la chance de pouvoir observer Newton en prise de vue c’est quelque chose d’incroyable pas seulement parce qu’il côtoyait des femmes sublimes mais pour l’univers qu’il évoquait au travers de ses images. Il a été le premier a introduire une part de fétichisme dans la photo de mode, en l’occurrence chez Vogue. Paris à cette époque était la capitale de la photographie.


4. NG : Dans vos photos, on devine un certain voyeurisme au service de la beauté, du glamour, de l’élégance, du sexe, du mystère de la chair. H. Newton disait: « Tout ce qui est beau est faux. Le plus beau des gazons est en matière plastique ». Alors, trop beau pour être authentique ?

RESSAN : c’est une question qui m’est souvent posée « Est-ce que ces images sont mises en scène ? » Il faut tout d’abord savoir que les couples qui souhaitent que je vienne immortaliser un moment, ont plutôt envie d’immortaliser des situations esthétisantes.

Pour la plupart d’entre eux, je n’ai nullement besoin de leur dire ce qu’ils ont à faire car ils savent très bien ce qu’ils ont envie d’offrir au regard des autres, il y a quelque chose de joyeux et l’envie de partager.

Cela serait ridicule de mettre en scène ces situations car l’imagination des couples échangistes est parfois, pour ne pas dire souvent, plus élaborée que mon propre imaginaire.

Ce travail qui a duré 3 ans, avec plus de 25 000 clichés, est le fruit d’une grande complicité avec toutes ces personnes. Plus les gens ont des métiers à risque ou exposés, plus ils sont excités à l’idée de montrer une partie d’eux même, sans être dévoilés pour autant.


5. NG : Le “libertinus” latin, c’est l’esclave qui a reçu la liberté, s’est affranchi du maître. Le mot a désigné à travers l’histoire celui/celle qui conjugue une double libération, celle de l’esprit et du corps. Pourtant vos photos montrent des hommes très habillés et des femmes peu vêtues, souvent soumises ou lesbiennes… Et peu de relations entre hommes. Est-ce un parti pris ? Le libertin du XXIème siècle est-il un aventurier qui s’ignore?

RESSAN : Ce monde évolue avec le temps; il n’est pas figé. Il est un miroir de notre société avec ses avantages et ses inconvénients. Il y a une quinzaine d’années j’ai rencontré Daniel Karlin alors qu’il préparait son film « Et si on parlait d’amour » cet homme qui venait de la radio et du grand reportage, qui a travaillé en autre avec Bruno Bettelheim sur les enfants autiste, m’a dit « Ce que vous faites est un travail d’ethnologue »

D’une certaine manière je laisse des images qui donne un regard sur une période, car à l’inverse d’un film porno, mon regard n’est pas guidé par les clichés que je peux me faire sur l’homme ou la femme, mais plus comme un modeste témoin de sa génération.


Pour sortir ce livre, J’ai attendu d’avoir deux hommes Bi et un soumis avant de clôturer mon livre car j’ai eu beaucoup de mal à trouver des hommes qui assumaient ces jeux, pourtant ce n’est pas faute d’avoir cherché.

Je dois parfois rassurer les personnes qui se questionnent sur la position de la femme. Il faut savoir que même dans les situations de soumises dans l’espace d’un jeu, elles le sont rarement dans la vie, c’est mal connaître cet univers pour le penser. J’ai rarement côtoyé une femme maltraitée dans son quotidien prendre du plaisir dans ce type de jeux. Ce monde répond a des codes bien plus qu’on ne l’imagine, ce n’est pas chacun fait ce qu’il veut quand il veut, il est le fruit d’un parcours parfois chaotique mais le plus souvent l’aboutissement d’une vie de couple « normal ».


6. NG : Dans un entretien avec Ève de Candaulie, vous évoquez l’accès d’un plus grand nombre aux pratiques libertines et l’absence de barrière sociale dans le milieu des libertins. Pourtant vos photos semblent mettre en scène une élite bon chic bon genre, saine et sophistiquée. La lutte des classes n’ est-elle pas soluble dans le plaisir?

RESSAN : C’est très marrant d’aborder cet aspect là, car il est vrai que les clichés de ce livre sont souvent réalisés dans des ambiances feutrées voire bourgeoises. Il est plus inspirant pour moi de réaliser de beaux clichés dans de beaux endroits que dans un Etap hôtel.



Sans aucun jugement de valeur, ma volonté était de montrer de belles images, j’ai donc volontairement préféré photographier des soirées chics et des endroits plutôt classes car c’est ce que je trouvais le plus intéressant d’un point de vue esthétique et photographique. Ce livre n’est que le reflet de belles soirées parisiennes et représente des couples ou femmes vivant à Paris ou venant à Paris vivre certains de leurs fantasmes. Il y a donc probablement un certain biais de sélection, d’où votre remarque.

Pour autant, même si ce milieu possède certains travers, il y a bien une chose que l’on ne peut pas lui reprocher : c’est un repli sur soi. J’en suis moi même une parfaite illustration. Mes parents étaient ouvriers, je n’aurais jamais côtoyé autant de gens de pouvoir ou influents si je n’avais pas fait ce métier dans ce milieu là ! Ce milieu n’est pas un cercle fermé proche d’une secte, il a besoin d’une certaine discrétion pour des raisons évidentes mais il se nourrit de gens nouveaux. Je n’ai par exemple jamais entendu de propos racistes ou autre. A l’inverse de certains repas ennuyeux, les conversations commencent rarement par « Qu’est ce que vous faites dans la vie ? ». La situation sociale n’est pas un facteur déterminant.


7. NG : De quelle nature sont les textes qui accompagnent vos photographies? Qu’est-ce qui a guidé votre choix ?

RESSAN : j’y ai à la fois mis des poèmes de Baudelaire et de Verlaine, et je tenais également à agrémenter certains sujets par des textes écrits par les femmes qui sont présentes sur ces photos, une manière de partager autre chose que des images. Il y en a 3 en tout.

8.NG : Cela a-t-il été facile ou compliqué de vous lancer dans ce projet de livre ?

Ressan : Lorsque j’ai évoqué cette idée de projet de livre j’ai été étonné du retour que j’ai eu, étonné de la bienveillance avec laquelle les gens ont souhaité y participer.


9. NG : Des projets en cours ? Ressan : Pour le moment je me consacre à la promo du livre et je travaille gentiment sur la suite à ce livre.


NG : Merci Ressan pour ces quelques confidences

Cet ouvrage richement illustré est à retrouver sur le site de Piment Rose : Paris Libertin


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1 Comment


samsmith2281337
Feb 18, 2021

blog très intéressant. Merci de partager des informations utiles. Je l'ai aimé. Je vous conseille également de vous familiariser avec un excellent site internet où vous pouvez beaucoup stresser et commencer à prendre des photos https://fixthephoto.com/how-to-become-a-professional-photographer.html

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